Clémentine, gabier sur l’Hermione, une frégate du XVIIIème siècle

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En lançant cette série de portraits de voyageuses, j’avais envie de partager avec vous des histoires inspirantes autour du voyage, du dépassement de soi mais aussi sur l’importance de suivre ses rêves. Alors pour cette quatrième interview, je vous présente Clémentine. Sa particularité ? Clémentine fait partie des 350 gabiers volontaires qui composent l’équipage de l’Hermione, une frégate du XVIIIème siècle. Sa punchline Instagram ? « Fearless explorer, Tall Ship Lover » autrement dit « Exploratrice intrépide, passionnée de navigation ». A travers cette interview, Clémentine nous raconte son quotidien à bord de l’Hermione, sa passion pour le roman « Wild » de Cheryl Strayed, sa traversée hivernale de la West Highland Way et les motivations qui la poussent à sortir de sa zone de confort. Bonne lecture !

En Juillet 2017, l’Hermione fait un appel à candidature pour recruter son nouvel équipage. Un appel à candidature auquel tu réponds. Qu’est-ce qui t’a motivé pour participer à une telle aventure ?

C’est probablement la même histoire que pour beaucoup de gabiers ! J’avais 8 ans quand j’ai visité le chantier de L’Hermione à Rochefort, je me souviens de sa structure toute en bois, de l’impression d’être dans le ventre d’un animal fantastique. Après ça je regardais l’émission Thalassa tous les vendredi soirs avec mes parents, espérant que l’émission soit sur des grands navires engloutis comme La Boussole et L’Astrolabe. J’ai grandi en lisant les romans de Robin Hobb « Les aventuriers de la Mer » et de Naomi Novik « Téméraire », deux séries mêlant aventures navales et fantaisie et en 2015, j’ai suivi de loin le départ de L’Hermione pour les Etats-Unis. En janvier 2017, je travaillais sur mon projet de diplôme et je me préparais à entamer une carrière professionnelle assise dans un bureau devant un ordinateur pendant toute la journée. C’est là que je me suis dit qu’il étant temps de provoquer ma chance et de vivre une folle aventure. J’ai envoyé ma candidature (une lettre de motivation en béton) avant l’appel officiel, et j’ai du attendre pendant 3 mois que le commandant sélectionne les volontaires et que je sois appelée pour passer la suite des tests de formation à Rochefort, sur le navire à quais.

Je voulais vivre un rêve et encore maintenant que la navigation est terminée, j’ai du mal à me dire que je fais bel et bien parti de l’équipage.

Tu intègres l’Hermione en tant que gabier volontaire. C’est quoi le rôle d’un gabier sur une frégate du XVIIIème siècle et comment se prépare-t-on pour effectuer un tel voyage ?

Un gabier c’est un marin qui est spécifiquement affecté à travailler dans la mâture aux manœuvres et à l’entretien du gréement (mâts, vergues, voiles, gréement courant et dormant). Il a des connaissances techniques spécifiques qui lui permettent de travailler en hauteur sur les vergues pour établir ou diminuer une voile par exemple. Gabier vient de « gabie », traduction de la hune en italien il me semble. La hune c’est la petite plateforme qui se trouve entre les mats et il arrivait que les gabiers dorment là, séparés du reste de l’équipage. Et je peux t’assurer que c’est tellement agréable de se retrouver là haut quand la mer est calme que je m’imagine bien y rester faire une sieste après mon quart !

En terme de préparation à l’époque j’allais à la salle entre 2 et 3 fois par semaine pour faire de la musculation. Je savais que ça allait être physique et du haut de mon 1m65 et 50kg je ne voulais pas être mise sur le banc de touche là dessus et qu’un grand gaillard prenne le relais. J’ai essayé aussi au maximum d’apprendre mon manuel de formation et de retenir les quelques 250 points de tournages du navire (les endroits où aboutissent les cordages et que l’on doit manipuler pour régler les voiles).

clémentine gabier hermione

Au début du mois d’Avril, tu embarques sur l’Hermione pour effectuer la traversée de Sète à Marseille. C’est quoi ton quotidien une fois en mer ?

Un quotidien bien organisé ça on peut le dire. À peine arrivé on nous affecte dans un « tiers », tribord, milieu, bâbord. Ça va définir notre rythme de vie à bord car tout le monde a des horaires et affectations spécifiques. Tribord commence en faisant Minuit – 4h du mat, eux ils sont affectés au mât de misaine, tout devant. Puis c’est milieu qui prend la relève de 4h à 8h. Eux sont affectés au grand mât et au mob (Man Over Board). Donc en cas d’homme à la mer, ils sont parés pour les manoeuvres de mise à flot du zodiac. Ils peuvent profiter du lever de soleil à l’horizon vers 6h, c’est une chose à voir au moins une fois dans sa vie. Et enfin Babord les remplace de 8h à 12h et est affecté au mât d’artimon. Et rebelote pour autre moitié de la journée, 12h/16h, 16h/20h et 20h/Minuit. L’affectation des tiers à un mat c’est vraiment de la théorie, au cas ou les 3 tiers soient sur le pont en même temps, pour ne pas se gêner les uns les autres, sinon pendant le quart on bosse sur le mât dont on a besoin pour la manoeuvre.

Moi j’étais une bâbordaise pendant ma navigation. On était réveillé à 6h50 par le rondier (celui qui est affecté à la ronde du bateau) de milieu, il/elle nous annonce le temps qu’il fait, le cap suivit par le navire, bref, toutes les infos à savoir quand on dort dans les étages inférieurs et qu’il n’y a pas de fenêtres dans nos postes ! On s’habille, on tire de sa bannette ou de son hamac celui ou celle qui a encore du mal à émerger et on monte petit-déjeuner en pont de batterie en tenue de travail. Des céréales, du pain, des fruits, puis on enfile nos harnais et c’est parti, il est 7h50 on doit être tous rassemblés en rang, devant le banc de quart, parés à prendre la relève de Milieu. Le chef de tiers nous fait un résumé du quart qui s’est écoulé, les étapes importantes ou pas d’ailleurs, et le programme à venir. Puis le quart partant chante un « BON QUART À VOUUUUS » répondu par un « MERCIIIIII »  par le quart entrant. Ça c’est dans le meilleur des mondes. Parce qu’en pratique tu peux être appelé en renfort pour le quart précédant le tien et être réveillé à 5h après t’être couché épuisé à minuit, et à froid tu dois monter aider à serrer le grand hunier  en plein sous la pluie et le roulie. Mais bon, « c’est ça qu’on aime » et c’est dans le grain qu’on voit le marin !

Suivant la navigation de la journée, une partie du tiers est détachée aux manoeuvres sur le pont et dans les voiles tandis que 4 personnes vont se relayer entre la ronde, la veille et la barre. Il y a 2 barreurs, sauf en cas de mer très calme. A la prise de quart par tribord, milieu redescend poser ses harnais en batterie et mange un repas bien mérité (et si y’a du rab on est ravie !) puis on fait le ménage. La batterie, le sol, les sanitaires, les postes, tout y passe. On est 18 à s’y mettre ensemble, ça va assez vite et comme on le fait tous les jours on est très efficace. Enfin n’étant pas de service on peut faire la sieste, ou monter regarder travailler les autres tiers. Sachant qu’on sera appelé par la cloche pour manger à 19h si mes souvenirs sont bons avant de prendre le quart à 20h, jusqu’à minuit.

Est-ce que tu avais des craintes ou des appréhensions avant de te lancer dans l’aventure ?

Hum, j’avais peur de ne pas être à la hauteur, d’être « nulle » en fait. Pendant la formation j’avais du mal à rapidement comprendre tous les points de tournage du navire, comme on établissait une voile et sur quel bout’ il fallait « tirer » pour actionner les voiles de ce fichu navire . Mais à force de lecture et d’entrainement et surtout de l’avoir sous les yeux, pour comprendre ces engrenages géants, ça a bien fini par rentrer, même si je panique encore un peu quand on me crie un ordre « CLÉMENTINE, PARÉ À FILER L’ÉCOUTE TRIBORD DE PETIT HUNIER ! »  et que tu ouvres de grands yeux et te répète à voix haute pour te rassurer « BIEN REÇU RYAN ! Alors, écoute tribord de petit hunier, écoute tribord de petit hunier….. je le sais, je le sais… elle est là ! ÉCOUTE TRIBORD PARÉE ! »

Faut arriver à se dire que tu as le droit de te tromper et que personne n’est devenu expérimenté en 5 jours. Fais de ton mieux, c’est déjà très bien !

Qu’est-ce que tu retiens de cette aventure et qu’est-ce qu’elle t’a apporté ?

C‘est le coté humain qui m’a le plus surprise, et quitter le navire a été un véritable crève coeur. Tu sais que tu es à bord pour un laps de temps très court alors tu donnes le meilleur de toi même. Et que 80 personnes, hommes et femmes mélangés, puissent vivre tous ensemble comme ça en ayant le minimum de conflit je trouve ça beau et impressionnant. Y a une cohésion folle qui se crée entre membres du même tiers, étant donné qu’on est h24 ensemble, qu’on dort et mange ensemble. Ma voisine de bannette Mäel me manque, j’appréciais de savoir qu’elle était juste là à coté de moi et qu’on s’entendait mutuellement parler la nuit (on s’était bien trouvé !).

Ce voyage m’a permis de prendre confiance en moi aussi et de me sentir un peu plus légitime dans ce que je fais. Quand on était à quais on devait gérer les visites, faire monter ou descendre les gens à bord, être disponible pour répondre à leurs questions… Une petite fille de 6 ans m’a posé plein de questions, toutes très intéressantes, pour savoir si j’étais une pirate, comment se passait la vie a bord, qu’est ce que c’était comme bateau, est-ce qu’elle pouvait grimper dans les voiles elle aussi, etc. Et  je l’ai vue redescendre de la passerelle qui permettait de monter sur le navire (on appelle ça la coupée) à quatre pattes en arrière pour avoir plus d’équilibre, et sans aucune peur, alors que des adultes se cramponnaient à la rambarde en ayant la frousse. Et je trouve ça génial de ne pas limiter ses enfants à la peur, aux choses qui pourraient leur arriver de négatif, et de les laisser être courageux.

Y a une phrase de Cheryl Strayed, l’auteure de Wild qui m’a beaucoup marqué quand j’ai lu son livre, et qui continue à énormément m’inspirer : “La peur est en grande partie dues aux histoires qu’on se raconte alors j’avais décidé de me raconter autre chose que ce qu’on répète aux femme. J’avais décidé que je ne courais aucun danger. J’étais forte. Courageuse. Rien ne pourrait me vaincre. M’en tenir à cette histoire était une forme d’autopersuasion, mais la plupart du temps, ça fonctionnait. Chaque fois que j’entendais un bruit d’origine inconnu ou que je sentais quelque chose d’horrible prendre forme dans mon imagination je le repoussais. Je ne me laissais tout simplement pas impressionner. La peur engendre la peur. La puissance engendre la puissance.
Alors j’avais opté pour la puissance.”

clémentine gabier hermioneCe périple sur l’Hermione n’est pas ton premier fait d’arme puisque l’hiver dernier tu es partie en solo le long de la West Highland Way, un chemin de longue randonnée en Ecosse. Qu’est-ce que « voyager » représente pour toi ?

Je pense que voyager seule me permet de me retrouver. De faire le point sur où j’en suis dans ma vie, où je veux aller. J’étais un peu perdue à ce moment-là, je venais d’être diplômée mais je ne trouvais pas de travail dans la région où j’étais, je venais de terminer 3 mois en tant que vendeuse pour payer le loyer et j’avais « subi » la période de Noël, plus que je n’en avais profité. J’avais besoin de me retrouver seule loin de la foule.

Mon projet de diplôme était « la marche dans la nature comme recherche de soi ». J’ai regardé quel trek était faisable en deux semaines. Je suis fascinée par l’Ecosse depuis petite, la magie des Highlands, les chants celtiques… En tombant sur la West Highland Way je me suis dit “c’est bon, je fonce”. J’ai pris mes billets d’avion à peine 15 jours avant de partir, j’avais trouvé très peu d’info sur ce trek en hiver (simplement parce que ce n’est pas vraiment recommandé de le faire en hiver) Mais je voulais y aller quand même. Me prouver que j’en étais capable. Encore maintenant y’a une partie de moi qui est restée là-bas, sur les hauteurs du Loch Lomond. J’en ai vraiment chié entre la pluie, la neige, le vent et mon incapacité à anticiper le dénivelé sur une carte (j’ai bossé dessus depuis !). Une journée, j’ai marché 32km sur les bord du Loch, escaladant les racines, montant et redescendant au gré du chemin, avec mes 15kg sur le dos et ma carte waterproof à la recherche du foutu refuge en pierre ou j’étais sensée passer la nuit. Le problème avec l’hiver en Écosse c’est que dès 16h il faisait nuit. J’ai terminé à la lampe torche, à moitié en courant/marchant dans la forêt, en me répétant qu’il n’allait rien m’arriver, me forçant à ne pas me retourner toutes les 5min, me persuadant que je pouvais le faire, que j’allais trouver ce fichu refuge en pierre (un Bothy). J’ai fini par le trouver. A savoir que les Écossais sont incroyables, parce que ce bothy consistait simplement en 4 murs de pierre, un toit en tôle , une table et 2 chaises. Mais il y avait aussi une cheminée avec du bois (plus ou moins coupé, mais au moins il y avait du bois), des allumettes dans une boite waterproof, un réchaud à gaz, des bougies et un stock de nourriture. ET AUSSI du réseau pour téléphoner ! A peine posée, j’étais trempée jusqu’aux chaussures (le gore-tex a ses limites) j’ai vite appelé mes parents et j’ai éclaté en sanglot. De fatigue, de peur, de fierté, un peu tout mélangé. J’ai passé une nuit peu reposante, avec des mulots qui grignotaient mon sac malgré mes précautions et comme le feux que j’avais fait s’est éteint pendant la nuit, je me suis réveillée avec le sac de couchage « gelé » au niveau de ma bouche.

On m’a dit que j’étais “toc toc” d’être partie en plein janvier là bas, mais jamais je ne regretterais d’avoir vécu un voyage comme ça.

J’ai aussi appris que ce n’est pas grave de renoncer, et que ta propre sécurité ne dépend que de toi. Je n’ai pas pu faire une partie du sentier étant bloquée par la neige et n’ayant pas de raquette ni de pic à glace, et étant seule, j’ai décidé d’écourter le périple et de prendre le train pour contourner la partie que je ne pouvais pas faire, plutôt que de continuer par fierté et de me blesser.

clémentine gabier hermioneQu’est-ce qu’il t’inspire aujourd’hui ?

J’ai toujours autant envie de voyager, je t’avoue que ça me démange un peu en ce moment. Je ressens au fond de moi ce besoin de me retrouver coupée du monde civilisé, dans la nature. Alors que dans mon quotidien, j’ai déjà tendance à me sentir un peu isolée, mes parents et amis proches n’étant pas dans la même ville que moi, et vivant seule. Je suppose que c’est un isolement relatif, et qu’en pleine nature on est entouré et apaisé par toutes ces énergies, cet écosystème dans lequel on avait l’habitude de vivre mais dont on s’est « séparé » avec la modernité.

En redescendant de Fort William, je lisais Mike Horn dont j’adore les récits de voyages. J’admire beaucoup l’homme pour son parcours et la maturité qu’il a développé avec le temps, ce que l’on ressent vraiment à travers son écriture. J’ai découvert John Muir en Ecosse, le père fondateur des parcs nationaux. Je connaissais déjà l’approche de Thoreau par rapport à la nature et au voyage et celle de Muir est toute aussi belle à découvrir. J’aimerais découvrir le récit d’autres femmes comme Cheryl Strayed, des femmes qui ont prit leur courage à deux mains et qui se sont battues pour elles-même.

As-tu un conseil à donner aux personnes qui souhaitent se lancer dans des aventures similaires aux tiennes mais qui hésitent encore ?

Déjà essayez de comprendre ce qui vous fait hésiter. On m’a appris que le doute est une force, mais qu’il faut toujours veiller à ce qu’il nous pousse en avant. Si c’est la peur, c’est normal. Tout le monde a peur à un moment ou un autre, ce qui est important c’est d’arriver à se lancer, à franchir un cap. Et si on échoue, tant pis, on apprend. A force de passer leurs journées à « liker » des photos sur les réseaux sociaux, les gens sont en train de louper l’essentiel, leur propre vie. Pour moi vivre ne consiste pas juste à se lever, aller bosser, rentrer et se coucher en regardant des séries pour s’évader (c’est mon humble avis), mais je ne me suis jamais sentie aussi vivante que depuis que j’ai pris mon courage à deux mains et que je me suis dit « ho et puis zut ! Je le fais, parce que j’en ai envie, parce qu’au fond de mes tripes je veux tenter d’aller dans cette direction-là et advienne ce qui pourra » .

C’est quoi ton prochain projet ? Et qu’est-ce qu’on peut te souhaiter pour la suite ?

Concernant l’Hermione, si tout se passe bien, en 2020 on devrait pouvoir partir naviguer pendant 2 ans sur les traces de l’expédition de La Pérouse. J’espère faire une partie de la navigation, pas forcément pour 2 ans mais au moins pour quelques semaines.

Pour mon prochain projet je ne sais pas encore… J’ai signé un CDI en mars avant de partir en mer et là cela fait 2 mois que je travaille comme graphiste pour les salle de sport Keep Cool. J’ai un nouvel appart, des collègues de bureaux au top, un demi-chat (celui de ma voisine qui est très curieux et passe ses journées sur mon canapé). Étant à la frontière avec le Lubéron ça me laisse pas mal d’endroits à explorer les week-ends. Mais je sens que j’ai besoin de repartir quelque part. J’espère aussi un jour pouvoir partager mes voyages avec quelqu’un et être « solitaire à deux ».  Le grand Canyon, Yellowstone, pourquoi pas le Pacific Crest Trail un jour ! Les Carpates, les parcs nationaux de Suède et Finlande… Le monde est vaste et j’espère avoir des étoiles plein les yeux pour le restant de ma vie.

Merci Clémentine d’avoir accepté de participer à cette série d’interviews. J’espère que son témoignage vous aura motivé et vous aura donné envie de vous lancer de nouveaux défis. Vous pouvez dès à présent suivre Clémentine dans ses aventures sur l’Hermione à travers son compte Instagram. Vous retrouverez également sur le blog d’autres portraits inspirants de voyageuses :

NB : Les photos de Clémentine sur l’Hermione appartiennent à l’association Hermione-La Fayette.

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